Livres Critique

Terminus Allemagne

  

 

  

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    C’est le genre de livre que l’on apprécie à petites lampées. Son propos : l’histoire d’un couple mixte pris dans la souricière  nazie. Lui, Richard K. est juif ; elle, Claire, "aryenne". Emaillé de formules pénétrantes ( « Il s’agissait d’enjoindre tout un peuple à adopter un regard sévère », p. 232 ), le récit conte l’inexorable destruction d’une famille, tentant d’abord de s’adapter ( « Ne pas s’énerver outre mesure (…) Ne pas se laisser devenir fous ! », p. 203 ) avant d’être finalement contrainte à la séparation et à l’exil : les enfants en Angleterre, le père à Cuba, la mère en Allemagne… C’est, ensuite, le temps du retour dans l’Allemagne effondrée avec son lot d’avanies : les restrictions, les traquenards ( cf. « les pièges à travailleurs » : réquisitions de passants pris au hasard ), la marginalisation rampante de ceux qui ont  fui le nazisme, l’impossible reconnaissance des victimes spoliées par l’Etat .

  Au-delà d’une mine d’enseignements sur l’Allemagne moderne (  cf. : « Le discours lénifiant qui susurre l’Europe en voulant parler de l’Allemagne », p.40), ce livre impressionnant prend en charge de nombreuses dimensions : d’une grande précision historique ( Ursula Krechel lui a consacré dix années de recherche  !), il ne se limite pas à décrire le ciel brisé d’une famille. Il témoigne aussi de l’impossible quête identitaire des « revenants », tout autant brisés par le règne de l’arbitraire  que par ses déterminismes. Considéré comme « le plus beau roman de la rentrée » par le Frankfurter Allgemeine Zeitung et distingué par le Prix du Livre Allemand en 2012, ce récit est un étourdissant  périple au cœur de l’Allemagne contemporaine. Un livre  fin, documenté et bouleversant, à ne surtout pas manquer.

 

 

Présentation de l’éditeur :

   Mars 1948, Richard Kornitzer débarque sur le quai de la gare de Lindau, sur les bords du lac de Constance, pour retrouver sa femme. Ils ne se sont pas vus depuis dix ans. D’origine juive, Richard Kornitzer a été mis à l’écart de la société dès 1934, perdant d’abord  son emploi de juge, puis ses privilèges de citoyen, à mesure que les lois raciales progressaient dans le pays. Sa femme Claire, aryenne, est également inquiétée, ruinée, mise au ban, tous comme leurs enfants Georg et Selma. Dans la folie nazie qui se prépare, la famille Kornitzer se déchire : les enfants sont envoyés pour leur protection en Angleterre avec l’aide d’une association de quakers, Richard est « obligé de fuir de son plein gré » à Cuba, pendant que Claire reste au pays. Après dix ans d’absence et d’incertitude sur le sort de sa famille, Richard doit maintenant reconstruire parmi les ruines d’une Allemagne vaincue, oscillant entre la peur et l’espoir du lendemain. Basé sur une histoire vraie, Terminus Allemagne est à la fois une fresque historique pleine d’humanité, et un incroyable roman psychologique sur le sentiment d’appartenance et la famille.

 

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L’auteure : Ursula Krechel est née à Trèves (Allemagne) en 1947. Après des études d’allemand, de théâtre et d’histoire de l’art, sa carrière oscille entre le journalisme et le théâtre. Côté écrits, elle publie de la prose et du théâtre, mais est surtout reconnue pour sa poésie – jusqu’à la publication, en 2012, du roman Landgericht (Terminus Allemagne dans la traduction française) qui rencontre un succès sans précédent.

 

Terminus Allemagne

Par Ursula Krechel

Traduit de l’allemand par Barbara Fontaine

 

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ISBN : 9782355361364
sept. 2014 ; 448 pages ; 19 €

 



02/09/2014
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