Livres Critique

La langue confisquée. Lire Victor Klemperer aujourd'hui.

 

 

 

 

 

 

 

Voilà ce que découvrait, ahuri, Victor Klemperer un beau jour de 1933 : « Des mots actuels appartenant à une sphère particulière pénètrent dans d’autres sphères. » Cette "sphère particulière" était celle de la mécanisation. Klemperer assistait à l'invasion d'images techniques  induisant une véritable robotisation du vécu et du langage. Arrêtons-nous cinq minutes et observons : aujourd'hui, on ne "note" plus les enfants on les soumet à une "évaluation" ; on ne parle plus par phrases mais par "éléments de langage", etc. Et si l'empoisonnement linguistique causé par les déviances managériales était en train de détruire la langue de Voltaire et de Rousseau ? Et si l'impérialisme de la technique déjà dénoncé par nos grands auteurs ( cf. Victor Hugo, etc. ) était la cause de  nos maux présents et à venir ?  Frédéric Joly  ne se limite pas à restituer ici la démarche de l'auteur de LTI ( La langue du Troisième Empire )  ;  nombreuses références à l'appui, il   incite à se pencher sur les évolutions en cours et à saisir " en quoi consistent les violences que nous infligeons à la langue. Et ce qu'elles disent de notre temps". Cet essai rigoureux offre une plongée vertigineuse dans les coulisses de l'ensauvagement contemporain. A lire sans faute pour résister.

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur :

 

"Tout au long du règne de Hitler, Victor Klemperer prend note, dans son Journal, des graves distorsions infligées à la langue allemande par le nazisme. Les enseignants seront désormais soumis à une « révision nationale et politique » – comme les voitures, note-t-il en 1934. On parle de « système » pour désigner le régime des années de Weimar, vilipendé en tant que régime parlementaire et démocratique « enjuivé ». Quant à l’adjectif « fanatique », il passe du registre péjoratif au registre laudatif ; le terme « libéral », lui, devient, à l’inverse, péjoratif, avant de disparaître tout à fait au profit de « libéraliste ». Klemperer assiste en fait à une sorte d’inversion sémantique généralisée, dont il note chaque manifestation dans son Journal. Il en tirera LTI, grand livre sur la manipulation de la langue par l’idéologie.
La langue confisquée restitue sa démarche, ce geste critique qui aide à comprendre comment on adhère à un langage, quel qu’il soit. Car la langue est un révélateur. Elle ne ment jamais : c’est elle, toujours, qui dit la vérité de son temps. Frédéric Joly, lisant Klemperer, nous aide ainsi à faire face à notre temps, ce temps de repli identitaire et de « post-vérité », un temps d’inquiétantes résurgences sémantiques aussi, où se voit brouillée la distinction essentielle entre le vrai et le faux."

 

 

 

L'auteur : Essayiste et traducteur, Frédéric Joly est l’auteur de Robert Musil. Tout réinventer (Seuil, 2015), un essai biographique salué par la critique. Il a donné de nombreuses traductions d’auteurs de la première moitié du vingtième siècle (Georg Simmel, Walter Benjamin) comme d’auteurs contemporains.

 

 

 

La langue confisquée. Lire Victor Klemperer aujourd'hui.

Par Frédéric Joly.

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http://www.premierparallele.fr/Maison d'édition spécialisée dans les essais et les documents.

Isbn : 9782850610073 ; sept. 2019 ; 285 pages ; 19 €



17/09/2019
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